Il resta silencieux un long moment, puis soupira comme résigné. Je préparai l’eau chaude, installai une chaise longue sur la terrasse et disposai les serviettes. Je l’aidai à s’asseoir et, tandis que je déboutonnais sa chemise, il dit d’une voix tremblante :
—Chérie… n’aie pas peur… si tu vois… la cicatrice.
Une cicatrice ?
Soudain, je me suis souvenue de quelque chose qu’Ángel avait dit quand nous sortions ensemble :
« Mon beau-père a une cicatrice dans le dos… c’est pour ça que ma famille a vécu si longtemps dans la peur. Quand tu feras partie de la famille, je te le dirai. En attendant… ne pose pas de questions. »
J’avais cru que c’était une cicatrice chirurgicale, une brûlure ou une marque insignifiante. Je n’aurais jamais imaginé que je la verrais en premier.
J’ai déboutonné sa chemise avec précaution. Don Héctor ferma les yeux et prit de courtes inspirations. Quand le tissu tomba, j’ai poussé un cri d’effroi.

Une longue cicatrice lui barrait le dos, mais ce qui m’a le plus marquée, ce n’était ni sa longueur ni sa couleur. C’était l’histoire qui se cachait derrière. Des années auparavant, Don Héctor avait sauvé une jeune enfant tombée de vélo. Cette enfant, c’était moi, sa future belle-fille. En me protégeant, il avait été grièvement blessé, ce qui lui avait laissé cette cicatrice.
Je restai figé, bouleversé par le courage et l’altruisme qu’il avait portés en silence pendant des décennies. Don Héctor ouvrit les yeux, les larmes luisant :
—J’étais terrifiée… à l’idée de perdre ta mère, qu’Ángel m’en veuille… mais je n’ai jamais regretté de l’avoir sauvée.
Cette nuit-là, je suis restée dans ma chambre en silence. Quand Ángel est revenu vers dix heures, il m’a vue pâle et m’a demandé :
-Ce qui s’est passé?
J’ai pris une grande inspiration et j’ai dit :
—La cicatrice de ton père… c’est parce qu’il a sauvé quelqu’un…
Les yeux d’Ángel s’écarquillèrent.
